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Antifascistes !

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Parce que nous sommes attachés à l'esprit de la Charte d'Amiens de 1906 qui fonda les bases du syndicalisme révolutionnaire, parce que nous nous opposons à la dérive réformiste de notre confédération depuis les années 1970 et que nous condamnons la déviance contre-révolutionnaire de notre CGT depuis la fin des années 90, nous avons fait le choix de ne pas mettre en lien le site de la confédération ainsi que celui de l'UD de la Creuse qui ont pris le chemin d'un syndicalisme bureaucratique et élitiste.

 

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19 octobre 2011 3 19 /10 /octobre /2011 20:12

Le 23 septembre 2009, c’est un Nicolas Sarkozy martial qui déclarait sur TF1 et France 2 : «Il n’y a plus de paradis fiscaux. (…) Les paradis fiscaux, le secret bancaire, c’est terminé.»

En pleine crise financière (saison 1, la saison 2 c’est maintenant), le président de la République prenait la tête d’une croisade anti paradis fiscaux. En février 2009, il menaçait la Suisse de la mettre sur la liste noire de l’OCDE. Le 1er avril de la même année, il déclarait sur Europe 1 : « Nous voulons très clairement qu'on précise les paradis fiscaux. Un paradis fiscal n'est pas un lieu où on ne paye pas d'impôts. Un paradis fiscal est un lieu où on ne donne pas de renseignements de l'origine des capitaux. » Et dès septembre, donc, l’affaire était réglée. Du moins de son point de vue.

 

 

 

Certains, comme le mensuel Alternatives économiques, avaient beau jeu de rappeler que la plupart des groupes du CAC 40 possédaient de nombreuses filiales basées dans des pays peu regardants, Nicolas Sarkozy n’en démordait pas. Il avait trouvé là un cheval de bataille qu’il risque fort, d’ailleurs, de ressortir en ces temps de campagne présidentielle.

Mais, pour le coup, le président pourrait se heurter à la réalité des faits. D’abord, le bilan de sa bataille est tout sauf reluisant. Et surtout, ces derniers mois, dès lors qu’il a été question d’évasion fiscale, de comptes offshore ou autres montages financiers opaques, ce n’était plus de la guerre sarkozyste dont il était question, mais du cercle de ses amis.

Car au fur et à mesure que les affaires sortent, les proches de Nicolas Sarkozy sous le coup d’investigations judiciaires semblent être plus ou moins adeptes du paradis fiscal. Dernier épisode en date, le compte luxembourgeois de Joëlle Ceccaldi-Reynaud. Longtemps suppléante de Nicolas Sarkozy à l'Assemblée nationale, maire de la très riche commune de Puteaux depuis 2004 et élue députée des Hauts-de-Seine en 2007, elle est également présidente de l'établissement public d'aménagement de la Défense et de Seine-Arche (Epadesa), issu de la fusion de l'Epad, établissement chargé de l'aménagement du premier quartier d'affaires européen un temps promis à Jean Sarkozy, et de l'Epasa, qui aménageait le territoire de la ville voisine de Nanterre.

 

Joëlle Ceccaldi-ReynaudJoëlle Ceccaldi-Reynaud

 

Selon le Canard enchaîné de ce mercredi, la justice a découvert en juin que Mme Ceccaldi-Reynaud avait ouvert en 1996 un compte au Luxembourg sur lequel elle a déposé « 20 millions de francs ». De l’argent provenant d’un héritage de sa grand-mère, clame-t-elle aujourd’hui.

Ce qui n’est pas l’avis de son propre père, qui guerroie depuis des années avec sa fille pour le contrôle de la mairie. Car l’enquête sur ce fameux compte et la commission rogatoire envoyée par le juge d’instruction de Nanterre, Richard Pallain, au Luxembourg a justement démarré quand Charles Ceccaldi-Raynaud a accusé sa fille d'avoir touché des commissions occultes.

La justice a découvert qu’outre les 20 millions de francs, d’autres virements avaient été effectués par la suite.

En 2005, le compte est estimé à « plus de 4 millions d’euros », mais il a depuis 2004 changé de mains. Ce sont à présent les enfants de Joëlle Ceccaldi-Reynaud qui en sont les bénéficiaires. En 2009, le compte est clôturé et s’envole vers une destination inconnue.

Depuis, le juge Richard Pallain a été muté, il revient donc au parquet de Nanterre, sous la coupe du fameux Philippe Courroye, de saisir un autre juge… Pas sûr qu’il y ait ici la diligence nécessaire, au vu du fiasco du traitement de l’affaire Bettencourt, qui a fini par être dépaysée à Bordeaux.

Bettencourt, évadée fiscale

 

Liliane Bettencourt.Liliane Bettencourt.© (dr)

Dans cette affaire, on avait appris que Liliane Bettencourt, généreuse donatrice à l’UMP, avait elle aussi installé des comptes dans des pays peu partageux en matière d’information fiscale. A l’été 2010, Mediapart avait révélé que l’héritière L’Oréal possédait au moins deux comptes en Suisse et une île non déclarée aux Seychelles, la fameuse île d’Arros.

 

Le premier compte suisse, basé dans une banque privée de Genève, était crédité de 16 millions d'euros. Un deuxième, dans une filiale à Vevey, renfermait 65 millions d'euros. La vieille dame a finalement régularisé sa situation fiscale en septembre 2010, non sans que la Sarkozie y laisse quelques plumes, Eric Woerth étant soupçonné d’avoir fermé les yeux sur cette évasion fiscale. (Lire ici)

 

Guy WildensteinGuy Wildenstein

D’autres généreux donateurs de l’UMP ont également excellé dans l’art de la dissimulation fiscale. Guy Wildenstein, membre du Premier Cercle, est ainsi accusé d’avoir dissimulé à la veuve de son père pas moins de 3 milliards d’euros. Ce représentant UMP des Français de l'étranger à Washington, a été mis en examen en juillet 2011 pour recel d'abus de confiance après la plainte de la veuve du marchand de tableaux Daniel Wildenstein, Sylvia Roth.

 

L’histoire commence le 23 octobre 2001, quand décède, après dix jours de coma, Daniel Wildenstein, le plus célèbre collectionneur et marchand d'art du XXe siècle. Pour sa veuve, Sylvia, c'est à l'époque un double choc, affectif d'abord, mais ensuite aussi financier, parce que les enfants que son mari a eus d'un premier mariage, Guy et Alec, lui apprennent assez vite qu'il n'a pas laissé derrière lui, comme elle le pensait, une immense fortune mais qu'il est mort ruiné.

La veuve va vite découvrir l’entourloupe : en réalité la plus grosse partie de la fortune de Daniel Wildenstein a été discrètement logée dans des «trusts», immatriculés dans des paradis fiscaux, et que ces biens ne figurent pas dans la succession. Le DeltaTrust est ainsi basé aux îles Caïmans et le SonsTrust domicilié à Guernesey. (Lire ici)

Comme Mediapart l’a raconté, les ministres du budget successifs, Éric Woerth d'abord, François Baroin ensuite, sont encore une fois soupçonnés d’avoir fermé les yeux. Ce n'est que très tardivement, cet été, que le ministère du budget s'est décidé à porté plainte pour fraude fiscale. Entre temps, Nicolas Sarkozy a trouvé le temps de remettre une Légion d’honneur à Guy Wildenstein. (Lire ici)

 

 

 

De Malte aux Bahamas

 

Bernard TapieBernard Tapie

 

Luxembourg, îles Caïmans, Suisse, Guernesey… C’est une autre destination qu’a choisi Bernard Tapie. Quelques semaines seulement après avoir touché un pactole d'environ 300 millions d'euros prélevés sur fonds publics, somme que lui a allouée un tribunal arbitral privé dans l'affaire Crédit lyonnais/Adidas, l'ancien ministre et homme d’affaires a investi fin 2010 à Malte, place privilégiée de l'optimisation fiscale en Europe, en prenant 20% des parts d'une société d'aviation domiciliée dans la petite commune de Sliema. Le montant de la transaction n’a pas été révélé. (Lire ici)

Il semble cependant que la totalité de la somme n’ait pas été investie puisque Charlie Hebdo a révélé cette semaine que le reste avait été transféré, fin 2010, vers une holding belge créée de toutes pièces : GBT Holding. Le but de la manœuvre ? Echapper à l’impôt. En restant en France, Bernard Tapie aurait en effet dû s’acquitter d’un impôt de 30% dès lors qu’il aurait souhaité se servir de cet argent…

 

Thierry GaubertThierry Gaubert© Reuters

Il y a quelques semaines, c’est un autre proche de Nicolas Sarkozy, Thierry Gaubert, qui avait dû admettre devant les juges qu’il possédait des comptes à l’étranger. Mis en examen dans le volet financier de l'affaire Karachi, il a reconnu en garde à vue qu'il possédait des comptes à l'étranger : le premier, à la banque Pictet, aurait été fermé en 2001/2002 et ses fonds transférés à la banque Pictet aux Bahamas. Le second se trouve à la banque Safdié de Genève, ouvert « il y a au moins 15 ans » et « qui dort depuis des années ».

 

Dans cette affaire, le juge Renaud Van Ruymbeke soupçonne un possible financement occulte de la campagne présidentielle d'Edouard Balladur en 1995. Thierry Gaubert était conseiller du ministre du budget d'alors, Nicolas Sarkozy.

Mais Thierry Gaubert a dû admettre devant les enquêteurs qu’il possédait d’autres comptes à l’étranger. L’un d’eux se trouve dans une banque libanaise et aurait été ouvert par Ziad Takieddine « sans son autorisation »

 

« Mes compliments à celui qui a mis ce système en place»

 

Z.TakieddineZ.Takieddine© Mediapart

Ziad Takieddine, personnage central de l’enquête financière liée aux attentats de Karachi, est lui aussi adepte du compte en banque discret. Comme l’a révélé Mediapart au cours de l’été, bien qu’évaluant lui-même sa fortune à près de 100 millions d’euros, il ne paye pas d’impôts en France.

 

Selon une déclaration de patrimoine que l'homme d'affaires a signée le 23 octobre 2008 dans le cadre d'une procédure de prêt bancaire engagée auprès de la Barclays, le montant de ses biens est évalué, au total, à 97,2 millions d'euros, dont plus de 40 millions sont localisés en France.

Résident fiscal français, Ziad Takieddine a non seulement contrevenu à l'obligation de déclarer son patrimoine − le seuil d'imposition à l'ISF était de 800.000 euros... −, mais il a méticuleusement dissimulé ses biens. Il a aussi caché les commissions perçues sur les ventes d'armes à l'Arabie Saoudite. Les 91 millions d'euros encaissés sur le contrat des frégates Sawari 2 en 1997 et 1998 ont été répartis sur plusieurs comptes offshore, déconnectés de ses comptes bancaires officiels.

Par exemple, l'appartement de plusieurs centaines de mètres carrés qu'il détient avenue Georges-Mandel, à Paris, d'une valeur estimée à 12 millions d'euros, appartient à une société civile immobilière dénommée Lamartine, laquelle est détenue par deux sociétés luxembourgeoises, Illor I SA et Illor II SA.

Or, d'après un autre document recueilli par Mediapart, ces deux sociétés domiciliées au Luxembourg appartiennent aujourd'hui à une entité panaméenne baptisée Alveston International SA, dont l'homme d'affaires franco-libanais est «le seul bénéficiaire ultime des parts». (Lire ici)

Pêché originel, la fortune de Ziad Takieddine se fonde de fait sur un paradis fiscal. Comme l’a montré Mediapart, dans l’affaire Karachi, le faramineux montant de commissions consenties par l'Etat français à une date (juillet 1994) où les négociations avec le Pakistan étaient déjà closes, a transité par une société écran de la DCN, Heine, implantée au Luxembourg. L'argent a ensuite été ventilé via une autre société offshore, Mercor, dont l'un des ayants droit est Ziad Takieddine. Or, un rapport de la police luxembourgeoise daté du 19 janvier 2010, présente Nicolas Sarkozy comme étant celui qui, avec Nicolas Bazire, alors directeur de cabinet d'Edouard Balladur, a validé la création de la société offshore Heine. (Lire ici)

Dans leurs conclusions, les enquêteurs luxembourgeois ne manquent pas de souligner: « Mes compliments à celui qui a mis ce système en place, il s’agit d’un travail méticuleux et en avance sur son temps. » Un compliment qui sied à bien des amis du président.

 

Source: Médiapart.fr

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19 octobre 2011 3 19 /10 /octobre /2011 13:39
Sur ces images, filmées lors des affrontements meurtriers entre coptes et forces de l’ordre dans le quartier de Maspero au Caire, la semaine dernière, des groupes d’hommes armés en civil sont aperçus à plusieurs reprises en train de violenter des manifestants. Pour notre Observateur, ces images sont bien la preuve que les "baltagias", les milices armées qui agissaient sous le régime d'Hosni Moubarak, n’ont pas disparu.
Le 9 octobre, une manifestation lancée à l’appel des coptes, les chrétiens d’Égypte qui représentent entre 6 à 10% de la population, a été organisée après l’incendie d’une église à Assouan. Le rassemblement, qui se voulait pacifique, a rapidement dégénéré en de violents affrontements entre forces de l’ordre et manifestants. Avec 25 morts et plus de 300 blessés, ces échauffourées sont les plus meurtrières depuis la chute du président Moubarak.
Au cours de cette soirée d’affrontements, la télévision d’État égyptienne a appelé la population à venir défendre l’armée qui "se faisait attaquer par des bandes de coptes armés" et manipulés par l’étranger. La chaîne a par la suite démenti ces informations et les a mises sur le compte de la "nervosité de la présentatrice", elle-même mettant en cause des hauts responsables de l’État qui lui auraient dicté son texte.
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Le Premier ministre, Essam Charaf, a de son côté appelé dans un communiqué à l’unité et condamné les violences, qu’il qualifie de fruit d’un "complot étranger et interne". Le ministre de l’Information, Oussama Heikal, a en revanche affirmé qu’il n’y avait aucune preuve que les manifestants aient attaqué l’armée et puissent donc être à l’origine des violences.
Ces images sont issues d’une vidéo de 25 minutes postée sur YouTube par l’un de nos Observateurs. Elles ont été filmées à Maspero dans la soirée du 9 octobre. L’originale, postée ici , comporte aussi des interviews de différents manifestants, chrétiens et musulmans, au lendemain des violences (en arabe).
Contributeurs
"Certains scandaient ‘Allah Akbar !’ (‘Dieu est grand !’) pour mettre de l’huile sur le feu"
Mohannad Galal travaille dans l’informatique. Il a 27 ans et vit au Caire.
Depuis le début de la révolution, j’essaie de suivre autant que je peux les manifestations et, dans la mesure du possible, je filme tout ce que je vois. Ce soir-là, je suis arrivé à Maspero en longeant le bâtiment du ministère de l’Intérieur et je me suis retrouvé, par erreur, au beau milieu d’un groupe de ‘baltagias’ qui s’était mêlé aux soldats [en Égypte, des milices connues sous le nom de ‘baltagias’, souvent constituées de jeunes recrutés dans les quartiers pauvres, étaient utilisées par les services de sécurité pour mater les manifestations à l’époque de Moubarak. Ils semaient le chaos afin de justifier l’intervention des forces de l’ordre, ndlr]. Ils étaient en civil et armés de bâtons, de sabres, de couteaux et même de briques. Ce qui était étrange, c’est que certains scandaient ‘Allah Akbar !’ (‘Dieu est grand !’) [vers 00'46'']. C’est une façon de mettre de l’huile sur le feu, mais surtout de faire en sorte que ces affrontements soient perçus comme d’énièmes violences interconfessionnelles, et donc nécessitent l’intervention de l’armée.
Un peu plus tard, un groupe a pris à parti un individu au seul motif, visiblement, qu’il était chrétien. On entend les personnes qui l’attaquent crier ‘C’est un chrétien ! C’est un chrétien !’[vers 01'50'']
En entrant dans une des rues adjacentes à proximité du Hilton Ramsès, je me suis retrouvé au milieu d’un autre groupe de ‘baltagias’. J’ai entendu un homme au téléphone, à l’entrée d’une galerie, dire : ‘Dis-leur de faire sortir les chrétiens qui sont à l’intérieur !’[vers 03'28''] Ensuite, le groupe a agressé deux chrétiens sans aucune pitié. L’un d’eux a fini par tomber la tête la première, puis il a été battu par l’armée, la police et des personnes en civil alors qu’il était à terre. On peut entendre l’un d’entre eux crier : ‘Arrêtez ! Arrêtez les gars, faut pas qu’on se fasse filmer.’[vers 04'55'']
Par chance, dans le feu de l’action, personne n’a vu que je tenais une petite caméra. Plus tard encore, lorsque les forces de sécurité ont chargé les manifestants, elles étaient clairement, une fois de plus, accompagnées de ‘baltagias’.
Pour moi, l’armée, aidée par ces milices, a volontairement fait en sorte que cette manifestation pacifique, à laquelle participaient aussi bien des chrétiens que des musulmans, dégénère. Elle souhaite rester maîtresse de la situation. C’est toujours la même rengaine que sous Moubarak. On met de l’huile sur le feu pour provoquer des violences et ensuite on se pose en protecteur de la nation et on se rend indispensable.
Je ne nie pas que la télévision égyptienne, qui a annoncé que l’armée se faisait attaquer et a appelé à venir la défendre [voir la vidéo de la télévision égyptienne faisant état d’au moins trois morts parmi l’armée et accusant les coptes ], ait pu pousser quelques citoyens à venir effectivement ‘porter secours’ aux soldats. Donc il est possible que certaines personnes soient venues spontanément participer à ces émeutes. Mais, d’après ce que j’ai vu, la plupart des personnes en civil accompagnant les forces de sécurité étaient de mèche avec elles et n’étaient pas venues là par hasard."

Mohannad Galal

Source: France 24.

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19 octobre 2011 3 19 /10 /octobre /2011 13:27

L'avenir des retraites risque d'être un des enjeux de la prochaine élection présidentielle. Le très probable candidat Nicolas Sarkozy assumera sans problème la contre-réforme de 2010 qui, faisant suite à celle de 2003, reculait l'âge légal de départ à la retraite (passage de 60 à 62 ans) et l'âge de la retraite à taux plein (passage de 65 à 67 ans), la durée de cotisation (41,5 annuités aujourd'hui) continuant à augmenter au rythme de l'espérance de vie. Le PS ne peut évidemment défendre officiellement une telle position. L'énorme mobilisation de 2010 est encore dans toutes les mémoires. Elle empêche un ralliement pur et simple aux positions de la droite. Mais loin de revenir sur les contre-réformes de ces dernières années, le programme officiel du PS prévoit simplement une possibilité de partir à 60 ans pour celles et ceux qui auraient à cet âge 41,5 annuités de cotisation, c'est-à-dire qui auraient travaillé sans interruption depuis l'âge de 18 ans et demi, autant dire, une infime minorité.

Au-delà de cet aspect, les positions du PS et de la droite sont très similaires car ils défendent la même logique basée sur une affirmation apparemment de bon sens: «puisque l'on vit plus longtemps, il faut travailler plus longtemps». De plus, alors même que, dans cette perspective, la durée de cotisation va continuer à augmenter, certains, comme le député socialiste Pascal Terrasse, se prononcent pour porter l'âge légal à 65 ans. Disons le nettement, faire travailler les salarié-es plus longtemps est inacceptable, et ce pour trois raisons.

 

Tout d'abord, l'accroissement de l'espérance de vie à la naissance ne date pas d'aujourd'hui. C'est un phénomène ancien qui commence à la fin du 18e siècle. Elle était de 45 ans en moyenne en 1900: à comparer, un siècle plus tard, aux 82,8 ans pour les femmes et aux 75,4 ans pour les hommes. Or dans la même période, le temps de travail annuel individuel a été divisé par deux pendant que le nombre d'emplois augmentait de trois quarts. Cela a été permis par un accroissement de la productivité horaire supérieur à celui de la richesse produite. Ainsi durant la même période, la productivité horaire a été multipliée environ par 30, la production par 26 et l'emploi total par 1,75. L'«espérance apparente de vie professionnelle» qui fournit une estimation du nombre d'années travaillées a baissé, pour les hommes, de 20 ans entre 1930 et 2000. La conclusion de ces chiffres est sans ambiguïté: le partage de la richesse produite peut permettre que l'accroissement de l'espérance de vie s'accompagne d'une diminution du temps passé au travail. C'est ce que l'on appelle le progrès social.

La deuxième raison renvoie à l'espérance de vie en bonne santé, c'est-à-dire sans incapacité majeure. Une étude de l'Ined datant de 2008 indique que «à 60 ans, un homme peut espérer vivre encore 21 années, mais seulement la moitié sans aucune des incapacités considérées dans l'étude». Augmenter la durée de cotisation et/ou l'âge de départ en retraite signifie que les meilleures années de la retraite, celles où l'on est en relative bonne santé, seraient donc transformées en années de travail. Alors même que les conditions de travail continuent de se détériorer avec une montée générale du stress et l'apparition de nouvelles pathologies, un grand acquis social de ces dernières décennies serait ainsi remis en cause. Les années de retraite cesseraient d'être un moment de liberté pour des activités choisies. Car les retraité-es sont aujourd'hui de moins en moins inactifs même s'ils sont traités comme tels dans les calculs économiques. Ils sont de plus en plus investis dans des activités socialement utiles. Ils produisent donc de la richesse, peut-être pas une richesse toujours quantifiable monétairement, mais oh combien nécessaire à la société. Vouloir faire travailler les salariés plus longtemps reviendrait à remettre en cause ce nouveau rôle social des retraités.

 

La troisième raison renvoie à l'hypocrisie fondamentale de cette orientation, car la retraite par répartition repose sur un double contrat implicite. Le travail fourni par la génération qui part à la retraite bénéficie à la génération suivante et cette dernière prend en charge les retraités. Ainsi chaque génération monte sur les épaules de la précédente et la création de richesse est partagée entre actifs et retraités. La solidarité intergénérationnelle a donc deux faces. Si les actifs paient les pensions des retraités, en contrepartie, les salariés âgés laissent leur place sur le marché du travail aux nouvelles générations. Cette exigence est d'autant plus forte que le chômage de masse perdure et que l'activité économique est atone. Décaler l'âge de départ à la retraite en voulant faite travailler les salariés plus longtemps revient à préférer entretenir le chômage des jeunes plutôt que de payer des retraites. Analyse confirmée par l'Insee qui note dans son Enquête emploi du troisième trimestre 2010 que, malgré la crise, l'emploi chez les 55-64 ans a progressé (+3 points) alors même qu'il reculait chez les 15-24 ans (-2 points).

 

Mais que se passerait-il si le comportement des entreprises restait ce qu'il a été ces dernières décennies et que celles-ci continuent de se débarrasser majoritairement de leurs salariés avant 60 ans? Dans ce cas, il sera de plus en plus difficile de réunir les annuités requises pour avoir une pension à taux plein. Les jeunes entrent de plus en plus tard dans la vie active et de nombreux salariés, dont une majorité de femmes, ont des carrières discontinues et n'arrivent déjà pas à réunir le nombre d'annuités demandé. L'augmentation de la durée de cotisation et le report de l'âge légal de départ à la retraite auront donc des conséquences importantes lors de la liquidation de la retraite et se traduiront donc alors en pratique par une pension réduite pour le plus grand nombre.

 

Or le paradoxe, c'est que les besoins de financement des retraites ne sont pas faramineux. En effet, le huitième rapport du Conseil d'orientation des retraites (COR) d'avril 2010 indique d'abord que l'accroissement rapide du déficit de la Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV) est dû essentiellement à la crise et que «la plus grande partie de la dégradation aurait eu lieu en 2009 et 2010 (...) A plus long terme, les effets directs de la crise s'estompent». Plus même, le COR montre que la dégradation du niveau des pensions et le durcissement des conditions de départ à la retraite ne sont pas inévitables à condition d'accepter que l'augmentation du nombre de retraités s'accompagne d'une augmentation correspondante des cotisations sociales. Ainsi quel que soit le scénario envisagé par le COR en matière de taux de chômage et de productivité, il serait possible de maintenir le taux de remplacement moyen (niveau de la pension par rapport au salaire) qui est aujourd'hui de 72 %. Si l'on prend le scénario du COR le plus défavorable, il faudrait trois points de PIB supplémentaires à l'horizon 2050. Cela correspond à une augmentation de 10,4 points de cotisations, lissée sur quarante ans, soit 0,26 point par an. Personne ne peut sérieusement affirmer qu'une telle augmentation mettrait en danger l'économie française. Le catastrophisme n'est donc pas de mise même si on peut regretter que ces projections entérinent les allongements de durée de cotisation issus des réformes précédentes.

 

Au-delà même du financement des retraites, dont on voit qu'il trouve des solutions à condition de ne pas considérer le partage actuel de la richesse produite comme intangible, le débat sur les retraites renvoie à un débat de société fondamental. Faut-il, comme l'affirment la droite et le patronat, «travailler plus» ou faut-il travailler moins Travailler moins pour partager le travail entre toutes et tous afin de lutter contre le chômage et la précarité. Travailler moins pour ne pas perdre sa vie à la gagner et avoir ainsi du temps pour soi et pour les autres. Travailler moins pour permettre à chacun, homme ou femme, de s'investir dans le partage équitable des taches domestiques et parentales, condition pour réaliser l'égalité entre hommes et femmes. A vouloir oublier ces aspects essentiels, le PS s'apprête à capituler en rase campagne face à l'offensive de la droite et du patronat.

Source: Médiapart.fr

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18 octobre 2011 2 18 /10 /octobre /2011 15:00

Il savoure d'avance la bataille. La large victoire de François Hollande à la primaire socialiste réjouit son ancien camarade, Jean-Luc Mélenchon, candidat du Front de gauche à la présidentielle. Lui promet un «débat exigeant» et une accélération de sa campagne dans les prochaines semaines. Au programme: la mise en place «d'assemblées citoyennes» et les ventes du livre-projet L'Humain d'abord, déjà diffusé à 220.000 exemplaires. Son équipe de campagne est présentée ce mardi. Strictement paritaire, elle doit refléter la diversité du Front de gauche, qui regroupe désormais six formations de la gauche radicale. Entretien.

Au lendemain de la victoire de François Hollande, quelle analyse tirez-vous de cette primaire?

Jean-Luc Mélenchon. Il y a des aspects très paradoxaux. Les primaires ont créé de la politisation et réveillé l'appétit de débat politique. C'est positif. Une partie de la mouvance de gauche s'est déplacée pour voter, y compris parmi les nôtres et malgré nos consignes de ne pas y participer. Mais il y a des aspects moins positifs avec le siphonnage médiatique qui débouche sur une fermeture du champ politique. Car même si deux ailes se sont distinguées autour de Valls et Montebourg, on a assisté à une discussion qui est restée à fleurets mouchetés entre pareil et même.

Passons à la suite. On a eu la primaire, très bien. A présent passons aux assemblées citoyennes! Notre rôle est maintenant de souffler sur les braises pour que l'incendie de la rébellion se propage. Ce n'est sûrement pas d'aller faire des déclarations sectaires en contemplant le reste du monde depuis notre donjon.

 

Comment expliquez-vous le score réalisé par Arnaud Montebourg au premier tour?

 

C'est un événement incroyablement favorable. Cela a été l'imprévu et la superbe nouvelle. Car si le siphonnage médiatique du débat a eu tendance à rabougrir la discussion politique, la présence de Montebourg a élargi la légitimité du Front de gauche et désenclavé notre discours. C'est un apport considérable: au lieu de nous éliminer du tableau, l'inverse s'est produit. La politique doit d'abord être vécue comme la construction d'espaces culturels: de ce point de vue, l'espace culturel de l'autre gauche a réaffleuré à la surface. Et c'est très bon pour nous.

 

Par ailleurs, sur le résultat, il y a une ironie mordante de l'histoire qui ne se révélera que progressivement. Car les primaires ont finalement abouti à investir l'ancien premier secrétaire qui a dirigé le parti socialiste pendant 11 ans et qui se vante d'avoir été à la tête des affaires à l'occasion de deux défaites! Après tous ces discours sur la rénovation voilà le bilan : tout ça pour ça! François Hollande a révélé le redoutable homme d'appareil qu'il est. Il a su transformer tout ce qui s'est passé depuis son départ de la tête du PS en un intermède sans signification politique particulière. Nous voilà ramenés aux conditions du débat qui ont justifié mon départ du Parti socialiste.

 

François Hollande est la figure emblématique de la mutation du socialisme français: il est le premier à avoir ouvert la voie clintonienne des prétendus« modernisateurs », dont Tony Blair a été la figure de proue européenne. Le débat sur la grande question de l'orientation à gauche, entre une ligne démocrate et une ligne de combat qui est désormais incarnée par le Front de gauche, va pouvoir avoir lieu.

C'est passionnant! Car ce n'est pas un débat entre deux personnes:il touche à l'identité de la gauche et, plus généralement, du pays. Avec l'aggravation de la crise, ce n'est plus une confrontation théorique abstraite mais une question d'actualité: que fait-on à gauche une fois au pouvoir? Le premier ministre grec Papandréou ou moi?

Pendant la campagne des primaires, la force de Hollande est de s'être ostensiblement limité au service minimum de gauche sans broncher, avec un magnifique sandwich au pain et un très grand bol d'eau tiède. Il a ramené tout le programme de la gauche à deux amuse-gueules: 60.000 emplois dans l'éducation nationale et le contrat de génération, c'est-à-dire la culpabilisation de tout travailleur de plus de 50 ans, prié de se demander ce qu'il fait là puisqu'il doit aider un jeune à prendre sa place...

  • Dans votre livre En quête de gauche, vous évoquez François Hollande en des termes peu amènes. Vous parlez d'un «sophiste raffiné» et de son «balancement circonspect, figure centrale de l'enseignement de l'ENA»...

     

    Je ne m'étais pas trompé! Et cela confirme une chose: en politique, des personnages et leurs orientations correspondent à des moments. Je ne pourrais pas être le porte-parole du Front de gauche et je ne serais pas crédible avec notre programme si je n'étais pas l'homme entier, parfois excessif, que je suis. C'est la même chose pour François Hollande: il est celui qui correspond le mieux à la ligne sociale-centriste.

     

    Mais pour avoir été longtemps, au sein du PS, un de ses principaux opposants et pour avoir remarqué sa capacité à éviter les affrontements idéologiques, ne craignez-vous pas de l'affronter lors de la campagne à venir?

     

    Mais non c'est l'inverse! François Hollande est le candidat qui clarifie le champ politique. Dès qu'il apparaît sur la scène, le Front de gauche réoccupe mécaniquement une position centrale dans l'espace idéologique traditionnel de la gauche, au lieu d'apparaître comme le M. et Mme Plus dans une logique de surenchère. Pour moi, la situation est plus simple désormais.

     

    Prenons l'exemple du nucléaire. Jusque-là, nous étions perçus, avec notre projet de référendum, comme ceux qui ne parvenaient pas à trancher. Nous sommes désormais centraux entre les pète-sec – les écologistes – et "M. Je ne fais rien" – François Hollande. Même chose sur les licenciements boursiers: Hollande veut les rendre plus chers. Nous, on veut les rendre impossible! Ou bien un licenciement est justifiable par des raisons économiques ou de personnes, ou bien il ne l'est pas, et il doit être rendu impossible!

     

    Il est pourtant difficile de prédire aujourd'hui quelle campagne fera François Hollande. Il peut s'ancrer davantage à gauche, ou donner un espace important à Arnaud Montebourg. Quel serait alors votre espace?

     

    Oui, ce sera compliqué. Il peut tout nous arriver. On peut être effacé en route. Je ne vois pas comment. On peut aussi être effacé au dernier moment parce que surgira un événement qui bouleversera tout. Mais à l'inverse, Hollande peut être éjecté du processus parce qu'au centre, il y a déjà un occupant. C'est M. Bayrou.

     

    J'ai toujours dit que la prochaine présidentielle ne ressemblera à aucune autre. Même si les gens se calment, ce sont les événements qui s'accélèrent. A la compétition des personnes s'ajoute une modification permanente de la scène. Les grands présents d'il y a cinq mois ont aujourd'hui disparu: Olivier Besancenot et Dominique Strauss-Kahn. On a aussi assisté au théâtre de boulevard autour de l'entrée et la sortie de Jean-Louis Borloo. A gauche, nous ne sommes plus que cinq candidats: c'est le niveau le plus bas depuis 1995. Et si Philippe Poutou pour le NPA n'obtient pas ses signatures, nous ne serons plus que quatre: ce serait un record du petit nombre! Donc l'argument de la dispersion ne fonctionne pas cette fois...

     

    Dans le résultat de la primaire, on voit pourtant que l'effet vote utile a déjà fonctionné...

     

    A nous de faire la démonstration que le vote utile, c'est nous. C'est tout l'enjeu de la campagne! Si j'arrive à prouver que le vote utile est celui qui assume la confrontation avec le système financier, qui veut transformer les institutions et organiser le partage des richesses, j'ai gagné. Sinon, Hollande l'emportera. Mais le jeu est très ouvert.

  •  

    Jean-Luc Mélenchon à Paris le 29 juin.Jean-Luc Mélenchon à Paris le 29 juin.© Reuters.

     

    Dimanche soir, les partisans de François Hollande ont affirmé que le score de leur champion était lié à son plaidoyer pour une gauche «apaisée». Ne sentez-vous pas un besoin d'apaisement?

    Je n'en crois pas un mot. Depuis Giscard, on sait ce que vaut le coup de la France décrispée. Les décrispeurs crispent tout le monde! Les gens vivent une souffrance incroyable. Le problème de la gauche est de savoir comment parler aux millions de gens qui pensent que tous les politiques sont pareils. C'est savoir répondre à l'angoisse de survie... J'étais récemment à Florange où l'usine, l'hôpital, l'école ferment... Les gens sont dans un état de prostration, ils n'entendent rien de tout ce spectacle. Plus que jamais, je pense que la politique, c'est 20% à 25% de convaincus de chaque côté avec, au milieu, une masse immense de gens qui ne se déterminera pas sur des étiquettes mais sur leurs impressions sur des candidats et sur les contenus programmatiques.

     

    On est dans une période où il va falloir contraindre au partage et affronter un système financier devenu fou et insatiable. L'Espagne vient de voir sa note dégradée, ce sera bientôt la France. Tout le monde sera mis au pied du mur et devra choisir: céder ou combattre? La centralisation du Front de gauche dans l'espace de gauche m'aide beaucoup à mieux maîtriser le déroulement de la suite. Pour l'instant, je me contente de renouveler mon offre publique de débat aux socialistes.

     

    Mais vous disiez, toujours dans votre livre, qu'il était impossible de débattre avec lui, qu'il représente «l'effacement des contradictions qui traversent la société, l'effacement de la notion même d'affrontement»?

     

    Cette fois, il va bien falloir qu'il l'accepte. Il n'aura pas avec moi un interlocuteur complaisant. Je reconnais cet homme comme un personnage intelligent, cultivé, qui a des choses à dire. Il ne pourra pas faire une collection de calembours et trois vannes à deux balles. Ça, c'est possible dans le secret des conseils nationaux du parti socialiste.

    Devant tout le monde, il devra répondre oui ou non à la VIe République. Est-il favorable à une assemblée constituante? A augmenter le Smic? Lors du débat, Hollande a dit qu'il voulait augmenter le Smic de la moitié de la croissance de l'année. Or, avec l'inflation, cela veut dire qu'en 2010, il donnerait moins de salaire que Nicolas Sarkozy!

     

    Il ne lui suffira pas non plus de répondre en martelant la "crédibilité". Mais quelle est la crédibilité d'une relance de l'économie avec des salaires et des recettes de l'Etat qui ne bougent pas? Que nous propose-t-il à part la politique qui s'applique dans toute l'Europe, de restriction des dépenses publiques et de contraction des salaires? Il faudra avoir avec François Hollande un débat exigeant.

     

    Voulez-vous faire de la question salariale un thème central du débat en 2012?

     

    J'y ai intérêt. La question centrale est bien celle du partage des richesses. Il faudra donc parler des salaires. C'est le vieux sujet tabou de la résignation: c'est toujours trop. Quand je propose un Smic à 1.700 euros, j'en vois qui sont à la limite de défaillir. Or c'est juste l'augmentation qu'on a fait passer en 1981. Et c'est moins que ce qu'on a fait en une nuit en 1968. C'est dire la régression dans la compréhension de la centralité de la question du partage des richesses...

     

    Entre les 17% d'Arnaud Montebourg et l'aile gauche du PS autour de Benoît Hamon, espérez-vous des ralliements, à tout le moins, des voix en plus?

    Evidemment. Je ne parle pas des cadres car la dimension de carrière joue un rôle important. Je n'ai pas de places à offrir et je n'ai pas d'argent. Mais dans le peuple de gauche, il me faudra convaincre. La partie sera rude mais beaucoup de gens sont potentiellement sur le même terrain que moi. Jusqu'à la fin de l'année, notre enjeu est de conquérir la sympathie, la reconnaissance et la légitimité sur les cadres intermédiaires de la gauche. Je parle des milliers de leaders syndicalistes et de leaders associatifs. Ces gens-là ne se laisseront pas attraper avec du vinaigre. La légitimité et l'autorité du Front de gauche vont donc s'étendre.

  •  

  • Au-delà, on a vu des partisans du Front de gauche, comme le conseiller général Patrick Viverge faire la campagne d'Arnaud Montebourg. A terme, espérez-vous une recomposition à gauche?

Evidemment. Je ne travaille qu'à cela. Je veux un autre cadre pour le pays. Et le score que je ferai bouleversera la donne. Mais, pour l'instant, je ne m'agite pas. Les socialistes entrent dans leurs investitures pour les législatives: le PS a une grande maîtrise de ce genre de calendrier. Le vainqueur va évidemment dépouiller les vaincus, dont les circonscriptions seront réservées aux femmes, ou aux alliés. Laissons passer ce moment-là mais, déjà, je sens que cela bouge.

 

 

Avec Pierre Laurent en 2009.Avec Pierre Laurent en 2009.© Thomas Seymat

Quand j'étais au PS, en 2007, on a avalé le résultat qui nous choquait mais on a essayé d'être utile dans la campagne de Ségolène Royal. Mais il y avait une telle distance entre la candidate et la masse des socialistes organisés que la machine grippait sans arrêt.

 

Ce ne sera pas le cas de François Hollande. Il est l'homme de l'appareil, il connaît la maison comme personne. Un homme capable de recycler Robert Navarro recyclera tout le monde. Et puis il va pleuvoir des titres: quand il était premier secrétaire, il y avait plus de monde au secrétariat national qu'au bureau national! Avec toutes sortes de gens dans la pièce... J'en ai même connu une qui assistait aux réunions du BN et qui n'était pas membre du Parti socialiste! C'est dire le niveau de dilution qui régnait.

François Hollande est l'homme de cette mouvance bazardifiée. Mais cela ne convient pas à ce que des milliers de gens sincères mettent dans l'engagement politique. Je le sais. J'ai déjà fait une répétition générale de ce genre de campagne: c'est ma campagne dans le grand sud-ouest aux européennes.

 

En quoi cette campagne de 2009 était une répétition générale?

 

Les gens d'appareil oublient que la gauche est faite de gens de gauche. Ils ne sont pas prêts à avaler n'importe quelle combine politicienne. Et même au-delà: lors de cette campagne, des socialistes ont voulu me donner un coup de main. Parce qu'ils me voyaient comme l'un des leurs et qu'ils ont dans le cœur les thèmes que je porte.

 

Des socialistes ont fait votre campagne?

 

Oui, ils ont distribué des tracts, collé des affiches... et désorganisé le dispositif des autres en ne faisant rien! Ne perdez pas de vue que je suis de culture socialiste. Je viens de ce courant. En dépit de tous les efforts que des dirigeants pour me ringardiser ou me guignoliser, cela n'a servi à rien. Au contraire: mon espace politique est élargi et, aujourd'hui, les choses deviennent plus simples. Chacun est à sa place, dans son discours et son authenticité.

 

Vous présentez ce mardi votre équipe de campagne. Comment espérez-vous pouvoir vous «enraciner» comme vous le souhaitez pour convaincre?

Mon affaire est séquencée jusqu'à la fin de 2011. On sort des primaires plus forts, plus tranquilles. Novembre, pour nous, doit maintenant être le mois où on va faire jouer les muscles. On va organiser des ventes de masse du programme et les premières assemblées citoyennes.

Depuis le début du Front de gauche il y a trois ans, vous parlez d'assemblées citoyennes. Mais pour l'instant, on n'en a pas vu la réelle efficacité.

 

Au départ, cette idée partait d'une intuition. Ce qu'on sentait à l'époque, c'est la révolution qui a éclaté dans le Maghreb et le mouvement des indignés. Nous sommes dans une situation de type pré-68 avec la même vague universelle, mais avec des contenus différents. Aujourd'hui apparaît une masse de jeunes salariés frustrés qui entraînent d'autres franges de la population.

En France, l'effet "indignés" est atténué par la proximité de l'élection car, à tort ou à raison, les gens se disent qu'ils vont régler leurs comptes à cette occasion. Sans compter qu'en France, au contraire de l'Espagne, les syndicats ne sont pas disqualifiés.

 

Les assemblées citoyennes doivent permettre que les gens investissent le champ des problèmes politiques sur le mode de 2005, en plus large. C'est la formule algébrique. Après, la formule arithmétique est plus difficile à trouver. Car certaines assemblées citoyennes ressemblent déjà davantage à des comités de soutien électoraux qu'à un soviet! Parfois, cela ressemble à un collectif anti-libéral et, parfois, c'est le tout-venant avec des gens qui ont participé aux primaires...

 

Nous essayons d'être collés au terrain avec l'idée que la marée va monter. Il ne faut pas faire une campagne à l'ancienne avec seulement des tracts, des affiches et pour seul slogan, "votez pour mon candidat, il lave plus rouge que les autres".

 

Pourquoi?

 

Parce que cela ne correspond plus du tout au moment politique. Si vous dites "faites moi confiance", les gens disent "mon œil".

 

 

Mélenchon et Buffet à la Fonderie du Poitou.Mélenchon et Buffet à la Fonderie du Poitou.© L.B.

 

Mais quand vous allez voir des ouvriers, à la Fonderie du Poitou Alu par exemple, vous remarquez bien à quel point ils peuvent être éloignés du Front de gauche...

 

Parce que la société est atomisée de mille et une manières. Avant, il y avait des liens, l'Eglise, le parti et les institutions communes. Tous les hommes allaient à l'armée... Tout cela a explosé. Mais aussi tous les identifiants politiques communs. La nation est devenue une affaire réservée à quelques-uns; la gauche et la révolution sont inconnues au bataillon et le capitalisme est le régime d'Etat. Donc oui, on est loin. Et c'est une poudrière.

 

La stratégie de votre campagne sera de taper sur les socialistes, sur la droite, ou sur Marine Le Pen?

 

La droite, bien sûr. Les contenus vont tout régler. Les gens ne supportent pas qu'on dise du mal des personnes. Aujourd'hui, personne n'aime Sarkozy mais il ne faut pas s'y fier. Rappelez-vous ce qu'on disait de Chirac ou de De Gaulle. Tout le monde était anti-gaulliste, sauf les électeurs. Cette fois, c'est pareil. Cela ne suffira pas. Mais cela devient plus simple dès lors qu'on évoque les contenus.

 

Par exemple, à Florange, on m'a demandé si j'étais d'accord pour interdire au Front national de participer à la manifestation. Spontanément, je n'avais aucun problème. Mais il fallait l'expliquer rationnellement. Un syndicaliste m'a expliqué qu'il n'en voulait pas car le FN venait les diviser. Voilà, c'est simple: cela part des contenus, pas de l'étiquette ou de la diabolisation. Je ne vais pas discuter de savoir si le MoDem, c'est mal parce que M. Bayrou a gouverné avec la droite. Même si cela signe un pedigree! Je vais dire que je suis contre la TVA sociale dont M. Bayrou est partisan. Les contenus dénouent toutes les questions politiciennes. Il ne faut jamais faire de querelles de personnes.

 

Pour François Hollande, j'aurai aussi plein de choses à dire sur son rapport à la classe ouvrière et les rapports de force sociaux. Quand on est socialiste, on n'est pas là uniquement pour organiser le bal mais aussi pour dire sur quelle musique on danse. Hollande a proposé de mettre dans la Constitution le fait que le contrat soit au-dessus de la loi. Mais sa République contractuelle n'est pas la République française, une et indivisible! C'est un bouleversement de l'ordre juridique français. Et qui a des conséquences concrètes: pour un syndicaliste, cela signifie qu'il est abandonné au rapport de force avec son patron.

 

Est-ce envisageable de faire un accord de gouvernement avec François Hollande?

 

Il va y avoir un débat. Dans une campagne, on ne descend pas de la montagne avec ses tables de la loi qu'on révèle. Il y a des étapes. Là, on est dans la semaine de l'épectase de François Hollande. Moi, je n'ai rien contre lui, je n'ai pas de compte personnel à régler avec lui. Même s'il n'a pas été très régulier avec moi. Ce n'est pas une affaire de personnes. Mais là, c'est vraiment trop beau comme débat.

 

Quand vous entendez François Hollande se revendiquer de plus en plus de François Mitterrand, cela vous donne-t-il envie de lui contester cette filiation?

 

J'ai gagné mes galons il y a longtemps et je n'ai pas de leçons à recevoir. Celui qui a rassemblé à nouveau des pièces et des morceaux des socialistes avec des communistes, c'est moi. Hollande, lui, est en train d'expulser, une nouvelle fois, du camp de la gauche des gens qui devraient y avoir leur place. Au profit d'alliances hasardeuses avec M. Bayrou. Mitterrand avait une très bonne formule à ce sujet:«Ils ne sont ni de gauche, ni de gauche.» Hollande veut une alliance avec eux: à nous d'empêcher ce désastre d'être consommé. Périssent ceux qui s'y abandonnent.

 

En réalité, le choc entre Hollande et moi, c'est celui de la gauche contemporaine. Comme à l'époque l'affrontement entre Blair et Jospin. Aujourd'hui, c'est saluer le courage de Papandréou en Grèce ou c'est dire, comme moi, qu'il est un lâche et un désorganisateur de la lutte. Que feront les socialistes? Payer la dette? Petit à petit, je vais tellement secouer Hollande qu'il va être obligé de bouger. Je vais essayer de l'arracher à ses atavismes. Et plus il lâchera, plus il me renforcera. C'est mon raisonnement. C'est ma stratégie de conquête du pouvoir et de l'hégémonie à gauche.

 

Ensuite, on arrivera à l'épisode numéro trois: fait-on quelque chose ensemble? Le Front populaire est une série d'événements que personne n'a contrôlés. Il y avait un accord électoral qui prévoyait un gouvernement des radicaux, les socialistes apportant l'appoint. Finalement, ce fut l'inverse! Cette année, les événements politiques et sociaux seront-ils synchrones? Si tel est le cas, l'élection sera extrêmement volatile.

 

Source: Médiapart.fr

 

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18 octobre 2011 2 18 /10 /octobre /2011 11:19

La famille de Gilad Shalit se dirige vers un hélicoptère pour aller à la rencontre de leur fils qui va être libéré par le Hamas

        

 

 

Alors que le sous-officier franco-israélien a été remis aux autorités égyptiennes, après plus de cinq de détention, aux termes de l'accord entre Israël et le Hamas, un autre prisonnier franco-palestinien Salah Hamouri se morfond dans une prison israélienne.

L'échange entre le jeune soldat israélien et un contingent de 477 détenus palestiniens, en majorité des condamnés à perpétuité dont 27 femmes, a commencé mardi à l'aube. Trois convois transportant 133 prisonniers palestiniens originaires de la Cisjordanie ont quitté deux prisons israéliennes pour le centre de détention d'Ofer en Cisjordanie d'où ils devaient ensuite transportés en autobus au barrage de Beitounia, près de Ramallah, pour y être libérés.

Un autre convoi transportant 147 prisonniers est pour part arrivé au terminal frontalier de Kerem Shalom. Il transportait une partie des Palestiniens qui doivent être relâchés en Egypte avant de pouvoir entrer dans la bande de Gaza. Les prisonniers libérés, qui ont embarqué dans les convois, étaient menottés aux mains et aux pieds. Ils ont quitté leurs uniformes de prison pour des habits civils. Plus de 1.000 policiers ont été déployés le long des itinéraires empruntés les convois. Suivant l’accord signé il y a une semaine sous médiation égyptienne entre Israël et le Hamas, un second groupe de 550 détenus palestiniens doit être libéré dans les deux mois.

A Gaza, le Hamas a préparé un accueil triomphal aux "héros" sortis de prison et décrété une journée de congé. Toute la soirée, les haut-parleurs des mosquées ont appelé la population à venir participer aux célébrations officielles de la "victoire de la résistance" sur la place de la Katiba à Gaza, où une vaste estrade et des milliers de chaises ont été installés pour accueillir les prisonniers.

"Il faut libérer Salah Hamouri et les autres prisonniers palestiniens"

Salah Hamouri et d'autres prisonniers politiques palestiniens dont le dirigeant du Fatah Marwan Barghouti ne seront pas libérés. L'étudiant franco-palestinien de 26 ans, enfermé, depuis maintenant sept ans, dans les geôles israéliennes vient lui d'être "mis à l'isolement" et "interdit de visite jusqu’au 5 novembre", nous confiait sa mère, Denise Hamouri, il y a quelques jours. Une mesure de rétorsion qui aurait été prise par les autorités israéliennes contre la grève de la faim entamée par les prisonniers palestiniens. Patrick Le Hyaric, député au Parlement européen et directeur de l'Humanité, en appelle aux "responsabilité du président de la République française et du gouvernement de faire tout ce qu’il faut pour libérer Salah Hamouri".

S'exprimant devant la presse à l'issue d'une rencontre, vendredi 14 octobre, avec Nicolas Sarkozy, le président palestinien Mahmoud Abbas a évoqué le cas de Salah Hamouri. M. Abbas a dit qu'il souhaitait que "tout le monde" fournisse "des efforts, y compris la France à nos côtés, afin d'obtenir sa libération".

Source: L'Humanité.fr

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17 octobre 2011 1 17 /10 /octobre /2011 19:59

         

 

 

Militant communiste depuis la Libération, Henri Malberg était présent à Paris au moment de la tragédie. Il revient notamment sur le traitement par l’Humanité de l’époque. « Honneur à ce journal », nous déclare-t-il.

Vous étiez militant communiste parisien à l’époque du 17 octobre 1961. Quel souvenir gardez-vous de ces années de guerre ?

Henri Malberg. J’avais 16 ans au moment de la guerre du Viêt-Nam, 24 ans lors du déclenchement de ce qu’on a appelé les événements d’Algérie, et 32 ans à Charonne. Donc ma génération, celle qui est venue très jeune au communisme au sortir de la guerre, a passé seize années de sa vie à mener le combat anticolonialiste. N’étant pas historien, j’évoque cette période à partir de mes propres souvenirs de cette époque et de tout ce que j’en ai lu depuis. Quand je regarde en arrière, j’ai un sentiment d’honneur en tant que militant, et l’impression d’avoir servi les intérêts de la France qui n’avait rien à gagner à cette guerre. On a du mal à imaginer aujourd’hui ce que furent ces années de la guerre d’Algérie. Des années de lutte farouche du peuple algérien et de leurs dirigeants, mais aussi de résistance du système colonial et impérialiste français allant jusqu’à la barbarie. On a du mal à imaginer ces gouvernements qui furent tour à tour centristes, socialistes, gaullistes, et qui ont nié la réalité de l’aspiration du peuple algérien à l’indépendance, et ont cru pouvoir y faire face par la répression. Ce furent des années très dures, dures aussi politiquement pour les communistes et les gens de progrès nombreux, intellectuels, étudiants, policiers, soldats, qui ont longtemps souffert de l’isolement au milieu d’un peuple qui, dans sa masse, a longtemps pensé qu’il fallait faire des réformes en Algérie mais sans accepter l’indépendance.

 

Comment avez-vous vécu la soirée du 17 octobre 1961 et les jours qui suivirent ?

Henri Malberg. Quand la journée du 17 octobre 1961 commence, j’ignore que le soir 20 000 Algériens, hommes, femmes, enfants endimanchés vont marcher dans Paris pour protester contre le couvre-feu. Cette manifestation était clandestine, si bien que la masse des Algériens eux-mêmes ignoraient le matin où ils iraient le soir. Les dirigeants du FLN n’avaient pas prévenu la direction du Parti communiste, en tout cas je n’en ai eu aucun écho. Donc, de la journée elle-même, je n’ai pas de souvenir précis. Avec le recul, un regret me vient : peut-être qu’un rassemblement commun du peuple français et des Algériens contre le couvre-feu auraient fini différemment. Mais on ne réécrit pas l’histoire. Les événements du soir, je les apprends donc le lendemain matin, en lisant l’édition spéciale de l’Humanité imprimé dans la nuit. La prise de conscience de la gravité des événements est immédiate : le 17 octobre est un massacre des innocents, un événement rare dans la capitale, une sorte de Commune des travailleurs algériens qui, dans leur masse, étaient des ouvriers accourus des banlieues et des quartiers populaires de Paris.

 

On conteste souvent au Parti communiste et à son journal l’Humanité, son engagement aux côtés des Algériens réprimés le 17 octobre et dans les jours qui suivirent. Partagez-vous cette lecture de l’histoire ?

Henri Malberg. Il est de bon ton aujourd’hui, à la télévision ou dans certains journaux, de dire que le Parti communiste n’a pas fait ce qu’il fallait lors de cette journée et dans les jours qui suivirent, qu’il est coupable, que son journal l’Humanité est coupable. C’est profondément injuste et inexact. En relisant les journaux de cette semaine cruciale, l’émotion m’étreint. Chaque fois, je suis frappé du courage, de l’intelligence politique qui s’exprime dans ces colonnes, et je peux dire, dans cette semaine là : honneur à ce journal. Ainsi, dans la seconde édition imprimée la nuit même, l’Humanité, qui n’avait pu rédiger qu’un encadré dans la une de sa première édition, consacre cette fois une page intérieure entière sous le titre : « Par milliers, les algériens ont manifesté hier dans Paris », avec une photo de la mobilisation prise sur les Grands boulevards. « Il y a des morts », écrit le journal sans pouvoir annoncer de chiffre, « certainement plus élevé » que deux comme annoncé par les dépêches d’agence. Les seuls journaux qui condamnent le gouvernement sont l’Humanité et le Libération de l’époque, celui de d'Astier de la Vigerie. Les autres s’interrogent selon leur ligne politique sur les responsabilités. Le 19, l’Humanité publie deux articles importants. L’un porte sur les « débrayages hier dans plusieurs usines contre la répression qui frappe les Algériens », qui donne écho aux protestations des salariés de Thomson, Saviem, Renault. L’autre est la publication de la déclaration du bureau politique du PCF, écrite au matin de la nuit tragique, et qui dénonce la « gravité des événements du 17 octobre », la « brutalité sans précédent » de la « répression contre les Algériens » et « la politique colonialiste du pouvoir gaulliste, illustrée une fois de plus par les sanglants événements d’hier ». Le PCF parle d’un « gouvernement en train d’élargir le fossé creusé entre Français et Algériens par sept années de guerre » et qui favorise la "discrimination et la haine" et compromet « les relations futures entre la France et l’Algérie ». Il en appelle à « la solidarité indispensable des travailleurs français et algériens » pour "en finir avec la guerre d’Algérie". Le PCF conclut en insistant « sur la nécessité de développer l’action unie pour imposer une véritable négociation avec le Gouvernement provisoire de la République algérienne sur la base de l’application du principe de l’autodétermination dans le respect de l’unité du peuple algérien et de l’intégrité du territoire de l’Algérie ». Quelle force politique peut dire qu’elle a tiré dans les vingt-quatre heures un tel enseignement de cette manifestation ? Le 20, l’Humanité rapporte l’interpellation du ministre de l’Intérieur Frey par le député communiste Jacques Duclos : « Qui a donné l’ordre de tirer ? » lui demande-t-il, tandis que le journal mène l’enquête et pose les questions qui dérangent : « Combien y a-t-il eu de morts au cours des nouvelles manifestations d’Algériens » du mercredi 18 ? « Est-il exact que 12 Algériens ont été, la semaine dernière, précipités dans la Seine ? » Toute la semaine qui suit et au-delà, le journal relate sans relâche les débrayages dans les usines, les manifestations de protestation d’Algériens, d’étudiants, de la Jeunesse communiste rassemblant « plusieurs milliers de jeunes » tenant « des meetings, des assemblées », organisant des « délégations à l’Elysée ». Et continue les révélations et les témoignages directs de violences, de brutalités, de gens morts. De cette lecture, il ressort que le 17 octobre, contrairement à ce que j’ai lu, n’a pas provoqué d’indifférence dans la partie la plus avancée du peuple français. Au contraire. Et au sein de la réaction de masse des communistes, les élus communistes se sont montrés particulièrement actifs. Lors d’une séance extraordinaire du Conseil de Paris qui suit le massacre, les élus communistes interrogent brutalement le préfet de police en lui demandant des comptes sur les noyés, les gens tués, les gens matraqués, les Algériens expulsés. C’est un moment dramatique, durant lequel le préfet accuse les Algériens de tirer sur les policiers, et prétend qu’il n’y a à déplorer que deux morts la nuit du 17. A l’Assemblée nationale, Robert Ballanger, au nom des communistes, dénonce les « brutalités sauvages » des forces de répression.

Cette journée s’inscrit dans une période d’affrontements durs, cet automne-là, à vous entendre, comme si la violence avait atteint son paroxysme après sept ans de guerre. Pourtant, il faudra moins de cinq mois, à partir de cette date, pour en finir avec la guerre d’Algérie. Peut-on parler alors du 17 octobre 1961 comme d’un « tournant » ?

Henri Malberg. On ne peut pas appréhender le 17 octobre comme si c’était un acte isolé, une tragédie incompréhensible dans ses origines, et sans prendre en compte son devenir. Nous sommes en 1961, la guerre dure depuis sept ans, la France et les pouvoirs qui se sont succédé ont tout essayé pour briser la résistance du peuple algérien. Ils se sont accrochés farouchement à ce morceau d’Empire, à ce pays qui comptait un million d’européens sur dix millions d’habitants. Ce conflit a connu plusieurs phases. En 1954, au début de la guerre, on traite l’insurrection algérienne par le mépris, comme un groupe de terroristes minoritaires, fanatiques, qui ne représente pas le peuple algérien, et on prend des « mesures d’ordre » qui cache une sauvagerie sans nom, c’est le temps des massacres du Constantinois. Pour le gouvernement de Pierre Mendès-France, l’Algérie ce n’est pas le Viêt-Nam. Le ministre de l’Intérieur, François Mitterrand, déclare : « L’Algérie, c’est la France ». Mais cette politique de répression échoue, alors que monte en France la volonté de ne pas s’engager dans une nouvelle guerre : les premiers envois du contingent provoque des manifestations, des casernes se révoltent et refusent de partir en Algérie. Cette volonté de paix débouche, aux élections du 2 janvier 1956, sur une victoire du Front républicain mené par le Parti socialiste et un grand succès du Parti communiste qui, avec 25,36 % des voix, fait élire 150 députés. L’idée majoritaire est alors qu’il faut éviter la guerre en Algérie en privilégiant la recherche d’une solution politique. Une chance historique se présente, qui aurait pu, si elle avait été saisie, épargner les vies de centaines de milliers d’Algériens et de 30 000 jeunes soldats français. Que de souffrances, que de deuils, que de honte auraient ainsi été évités. L’histoire en a décidé autrement : le premier ministre socialiste Guy Mollet chassé d’Alger sous les tomates des partisans de l'Algérie française, engage le contingent, avec un mot d’ordre en apparence de gauche : celui du combat de la République laïque de liberté, d’égalité et de fraternité contre les forces obscures. C’est terrifiant. Ce sont ces mêmes arguments que l’on retrouvera plus tard chez Reagan et sa lutte contre "l’Empire du Mal ". Mais Guy Mollet aussi échoue, avec le coup de force d’Alger du 13 mai 1958 qui ramène De Gaulle au pouvoir. Pendant deux ans, ce dernier fait tout pour gagner la guerre. Il propose la paix des braves en exigeant la capitulation des Algériens qui la refusent, et c’est à l’issue de ces trois temps que s’annonce 1961, année centrale parce que c’est durant cette année que De Gaulle arrive à la conclusion que la France ne pourra pas gagner la guerre et que le principe de l’autodétermination du peuple algérien est adopté. Rappelons-nous le contexte : le 23 avril 1961, le coup de force des généraux d’Alger est brisé par la résistance de De Gaulle et le soutien à la République qu’affirment les communistes, les syndicats, la majorité du peuple et du contingent, qui refuse de suivre les ultras de la guerre. Simultanément naît l’OAS, organisation fasciste, tandis que les négociations se poursuivent avec le gouvernement provisoire de la République algérienne, et qu’un véritable front hostile à la guerre s’est mis en place, comprenant les intellectuels, les syndicats, les communistes, qui s’élargit sans cesse au rythme effréné des manifestations. C’est dans ce contexte de tensions et de violences que survient le 17 octobre, mouvement de révolte des Algériens de métropole qui refusent la chasse au faciès et le statut de citoyen de seconde zone, malgré la violence de la répression. C’est ce mouvement que Papon et le gouvernement choisissent de briser, parce qu’il contribue à la recherche d’une solution pacifique en Algérie, en montrant la force des Algériens de France. Le 17 octobre 1961, c’est donc une répression sauvage, mais ce n’est pas que cela : c’est aussi un moment politique majeur, d’autant plus que dans l’appareil d’Etat une partie des gens qui soutenaient De Gaulle l’ont lâché. Après l’année cruciale 1961, on s’approche de la semaine cruciale, celle qui entoure la manifestation de Charonne, en février 1962.

Le massacre de Charonne s’inscrit-il dans le prolongement de la nuit du 17 octobre ?

Henri Malberg Le 17 octobre 1961 est le prélude à ce que j’appelle la semaine décisive, parce que c’est elle qui donne le signal que, cette fois, on va en finir une bonne fois pour toutes avec cette guerre, et aller vers le droit à l’indépendance du peuple algérien. L’OAS, qui sent le vent tourner, installe la guerre en France. C’est en réaction à ses agissements qui choquent l’opinion que la manifestation de Charonne a lieu, sous le mot d’ordre : « A bas le fascisme, OAS assassin, paix en Algérie ». Après le crime de Charonne, la cause est entendue parce que converge un mouvement populaire irrésistible en France. Charonne reste une grande date dans l’Histoire de France. Les obsèques de Charonne sont à la fois un acte de douleur et de souffrance mais aussi l’une des plus grandes manifestations politiques de l’histoire d’après guerre. Les grèves et ce million de gens qui viennent crier leur peine au Père Lachaise, c’est immense et, objectivement, c’est ce qui donne les forces à De Gaulle pour conclure la paix, parce que le peuple a dit assez, parce que De Gaulle veut mettre fin à cette guerre, et puisque l’OAS est isolée. Les obsèques ont lieu le 13 février, les accords d’Evian sont signés le 18 mars. Il y a donc bien une année de basculement, et le 17 octobre en est un moment.

 

Des questions subsistent sur la ligne du PCF durant toutes ces années de guerre. On lui a souvent reproché de ne pas avoir donné de mot d’ordre clair en faveur de l’indépendance algérienne, lui préférant celui de paix en Algérie, souvent perçu comme une marque de distance vis-à-vis de l’aspiration nationale algérienne. Selon vous, le PCF a-t-il failli à son engagement anticolonial concernant l’Algérie, ou sa position a-t-elle été caricaturée ?

Henri Malberg Que l’on ait été caricaturé, c’est clair, puisque, dans tous ses textes fondamentaux, le PCF est tout à fait convaincu que l’indépendance est au bout du chemin. Cela vient de très loin : Maurice Thorez parlait déjà, avant la guerre, de l’Algérie comme d’une nation en formation. La position s’infléchit certes après la guerre, où le PCF soutient, en 1946-1947, la création de l’Union française, que même Ho Chi Min, à un moment donné, a considéré comme une voie possible dans le contexte d’après-guerre, avec la poussée des forces progressistes, le programme du CNR et la présence des communistes au gouvernement, qui ont fait espérer une union de peuples permettant à ces pays de trouver un chemin d’émancipation. Mais la Guerre froide, la passion impérialiste de la bourgeoisie française et le profit qu’elle tirait de la colonisation ont fait rapidement de cette issue une utopie appartenant à l’Histoire. Reste que le mot d’ordre de paix en Algérie est une question très complexe, qui nous a fâchés avec des gens. C’était bien plus dur que pour le Viêt-Nam. Parce que l’Algérie est de l’autre côté de la Méditerranée, parce qu’elle comptait un million d’Européens sur dix millions d’habitants. Nous étions tenaillés par l’idée de ne pas demeurer un petit groupe isolé de la majorité du peuple, et de gagner cette majorité à nos vues. Dans cette optique, l’idée arrêter cette guerre, de faire la paix et de ramener le contingent était le mot d’ordre le plus juste. Et pendant longtemps, nous avons été quasiment les seuls à agir en ce sens. Lorsque le mouvement a gagné en force, des intellectuels et des communistes ont alors monté le réseau Jeanson d’aide au FLN. En tant que parti politique, nous avons considéré que ce type d’actions ne menait nulle part et contribuerait à nous isoler. Avec le recul, je regrette ce que j’ai pensé de ces gens. C’était leur conscience, nous étions du même côté de la barricade, même si je persiste à penser que nous aurions commis une erreur historique en les imitant, car l’évolution décisive dont j’ai parlé n’aurait peut-être pas eu lieu. Alors bien sûr, les communistes n’ont pas toujours eu, à la minute près, le bon mot juste, le bon éditorial, la bonne attitude. Mais j’observe qu’il est quand même insupportable que, alors que toutes les grandes formations politiques, droite comme PS, ont été au-dessous de toute dignité dans cette histoire, on ne parle jamais de leur attitude : eux ont tous les droits de se tromper, les communistes aucun. Mitterrand a quand même laissé guillotiner plusieurs dizaines d’Algériens quand il était Garde des Sceaux de Guy Mollet ! Et on voudrait nous dépeindre comme inhumains, dans le sens d’une intelligence supérieure qui à chaque moment doit deviner la suite de l’histoire ? Non, cela ne se passe pas ainsi.

Les critiques se cristallisent sur un moment particulier : celui du vote des pouvoirs spéciaux à Guy Mollet, le 12 mars 1956, qui sert d’exemple pour affirmer que, finalement, le Parti communiste ne s’est pas distingué des autres partis ou, pour le moins, n’a pas été plus vertueux. Qu’en pensez-vous ?

Henri Malberg L’épisode des pouvoirs spéciaux n’a duré que trois mois. Des camarades pensent aujourd’hui que c’était une erreur, car selon eux, la suite était inscrite, et donc, en réfléchissant bien, nous n’aurions pas dû voter les pouvoirs spéciaux à Guy Mollet. Je continue à penser quant à moi qu’il fallait le faire, pour des raisons simples : le peuple avait voté massivement pour une politique de paix en Algérie, Guy Mollet se présentait non pas comme un ultra mais comme un homme qui voulait les pleins pouvoirs pour trouver des solutions politiques. Je préfère endurer le reproche que nous avons eu tort au regard de la suite des événements, plutôt que celui de n’avoir pas saisi la chance de mettre fin à cette guerre, quand bien même il n’y en avait qu’une sur mille. Le vote des communistes n’avait rien à voir avec une carte blanche accordée à Guy Mollet : au contraire, notre vote était conditionné à l’application d’une politique bien définie. Et on peut relire cette explication de vote un demi siècle après avec honneur. Ceci étant dit, nous ne sommes pas à chaque instant comptable de l’avenir du monde, l’histoire nous a montré d’ailleurs que c’est lorsqu’on croit cela que l’on commet les erreurs les plus lourdes.

Comment expliquez-vous le relatif silence qui entoure les événements d’octobre 1961 au regard des intenses commémorations de Charonne ?

Henri Malberg Je pense que, pendant longtemps, on a sous-estimé la portée du 17 octobre 1961. Pendant des années on s’est tu là-dessus. Tenant compte que Charonne s’est produit à la toute fin de la guerre d’Algérie, il est logiquement devenu le moment clé, historiquement. Mais cela commence à changer. Avec le retour de l’intérêt pour l’histoire dans la vie politique française, les langues se délient autour de la signification du 17 octobre 1961. Cinquante ans après, au lieu de se concentrer uniquement sur le dénouement, apparaissent aujourd’hui plus clairement les points forts de cette histoire. Ceci dit, il ne faut pas en rajouter, on ne découvre quand même pas aujourd’hui ce que fut cet événement. Il n’y a qu’à lire l’Humanité Dimanche d’il y a vingt ans pour s’en convaincre, où j’ai retrouvé une page tout à fait remarquable. Mais le lien entre le 17 octobre et Charonne s’établit davantage aujourd’hui à mes yeux comme l’une des « arêtes » de cette histoire.

Que s’est-il passé exactement la nuit du 17 octobre 1961 ? De Gaulle y a-t-il joué un rôle ? Ou s’agit d’une répression déclenchée par les ultras pour contrecarrer le chemin vers l’indépendance ? Et dans ce cas, ce massacre n’a-t-il pas desservi d’abord la cause des assassins en créant un basculement dans l’opinion en faveur de la fin de la guerre ?

Henri Malberg Sur le dernier point, je pense que oui, car à cette époque, je le répète, les assassins tuaient tous les soirs. Le 17 octobre manifeste le sentiment massif de la population et des travailleurs algériens, et il a des conséquences profondes sur l’opinion française malgré les manipulations médiatiques et les mensonges du gouvernement. Plusieurs écrivains et historiens ont tenté de dresser un bilan des morts. Ils continuent de diverger, l’écart allant de 50 à 200 tués. Mais la certitude est qu’il s’est agi d’un vrai carnage. Quant aux responsabilités, Papon a assumé la répression, le ministre de De Gaulle, Roger Frey, a couvert Papon, lequel Papon avait clairement donné carte blanche à ses policiers dans la semaine précédant le massacre en promettant de les couvrir. Il a fait passer cette consigne dans les commissariats en s’appuyant sur le ressentiment créé par l’exécution de policiers par le FLN. Quant à De gaulle, ma conviction personnelle est que je ne l’imagine pas disant : « Tuez deux cents arabes ». Mais je pense qu'il ne voulait pas être sous la pression de la rue au moment où les discussions se poursuivaient avec les Algériens. Je pense, mais je n’en ai aucune preuve, que sa volonté était de faire régner l’ordre pour avoir les mains libres dans ses négociations avec les Algériens. Comme déjà durant la Résistance, il n’a jamais aimé l’intervention populaire, se réservant sa liberté de choix politique. Et puis il n’appréciait pas dans ce moment l’action des communistes, même s’il en tenait compte. En tout cas, l’instruction est venue d’en haut, on ne déplace pas des milliers de policiers sans ordre du pouvoir.

 

Source: L'Humanité.fr.

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17 octobre 2011 1 17 /10 /octobre /2011 19:44

L'administration pénitentiaire veut tuer un film racontant le déménagement d'une vieille prison vers un centre déshumanisé.

Depuis le mois de mars, le documentaire « Le Déménagement », de Catherine Rechard, est en attente de diffusion sur France 3 Bretagne. Ce beau film de 54 minutes raconte le déménagement, début 2010, des prisonniers de la vieille maison d'arrêt Jacques-Cartier, à Rennes, vers un centre de détention situé en périphérie de la ville.

Tous les détenus interrogés avaient bien sûr accepté d'être filmés. Et, aussi, d'apparaître à visage découvert dans le documentaire. Conformément à la loi. Mais l'administration pénitentiaire refuse que le film soit diffusé ainsi, et demande que leurs visages soient floutés. Avec des arguments ubuesques. La réalisatrice et la production s'opposent au floutage, ainsi que France 3, qui a peur de braver le pouvoir en passant outre.

Seules les projections en salle sont autorisées

Depuis six mois, cette affaire choque le petit monde judiciaire, ainsi que le rare public qui a pu voir le film. Au compte-gouttes, car seules les projections en salles sont autorisées.

On a enfin pu comprendre, mercredi 12 octobre, de quoi il en retournait, lors d'un extraordinaire débat organisé par l'Association de la presse judiciaire à la maison du barreau de Paris, après une projection du film.

Extraordinaire par les interventions successives, sur l'estrade et depuis la salle, qui ont permis de comprendre les véritables raisons de cette censure. Elles sont politiques.

Dans le mauvais rôle, Alain Jego, directeur interrégional des services pénitentiaires, dépêché au dernier moment de Lille sur instruction de sa hiérarchie (le ministère de la Justice).

Il a redit les raisons du blocage : l'article 41 de la loi pénitentiaire de 2009, qui régit les conditions de diffusion d'images ou de sons pouvant permettre l'identification d'un détenu. Il stipule aussi, et c'est une nouveauté de 2009, que l'administration peut s'opposer à cette diffusion dans quatre cas.

« Les condamnés ont le droit à l'oubli », donc au floutage

Selon Jego, c'est le dernier, prévoyant une restriction « nécessaire [...] à la réinsertion de la personne concernée », qui s'applique en l'espèce. « Les condamnés ont le droit à l'oubli », justifie-t-il. « Mais c'est à eux de le décider, par à vous ! » lui répond le réalisateur Rémi Lainé depuis le premier rang. « Vous retirez leur dernier libre-arbitre aux détenus », dit quelqu'un d'autre. La question du droit à l'oubli, cruciale, n'est pas mentionnée dans les restrictions de la loi.       

 

 

Les réponses du représentant de la Pénitentiaire ne convainquent personne. Plusieurs fois, la même question revient : « Comment justifiez-vous cette décision ? »

Assis sur l'estrade non loin du haut-fonctionnaire, le cinéaste Jean-Xavier de Lestrade remarque que « la réinsertion, c'est aussi l'identité, le droit à la parole », ajoutant :

« J'ai l'impression que les réalisateurs connaissent mieux la réalité des détenus que vous. »

« Vous voulez flouter pour qu'ils apparaissent comme dangereux »

Dans le public, le chroniqueur judiciaire du Figaro, Stéphane Durand-Souffland, prononce à l'adresse d'Alain Jego une phrase qui suscite un brouhaha d'approbation dans la salle. Pour lui, cette censure est aussi idéologique :

« Si vous voulez flouter les gens à la télévision, c'est parce que cela les fait apparaître comme des gens dangereux. »

Le film de Catherine Rechard montre au contraire des détenus très humains, avec leurs cassures, leur sensibilité, leur intelligence ou leur niaiserie, parfois. Jamais la raison de leur condamnation n'est évoquée.

Le haut-fonctionnaire n'en démordra pas. Plus tard, avant de reprendre son train vers Lille, il ira jusqu'à dire que « la prison n'est pas un contexte où un détenu peut avoir son libre-arbitre ».

Mais c'est sans doute une autre phrase d'Alain Jego qui justifie le mieux cette censure. Sa réponse à une question sur l'autorisation de diffusion en salles, et pas à la télé :

« Cent cinquante personnes, ça n'a pas le même retentissement que cinq millions. »

« Des raisons politiques », selon un directeur de prison

L'impact. Pour un autre directeur de prison, présent lui aussi à l'estrade mais à la parole plus libre que son collègue puisqu'il est élu syndical, la raison de la censure est « politique ». Boris Targe, du Syndicat national des directeurs pénitentiaires :

« L'administration se positionne pour des raisons politiques, en raison de son programme immobilier qui est un des axes majeurs de la politique pénitentiaire. »

La prison où sont désormais enfermés les prisonniers de Rennes est l'une des 25 nouvelles prévues pour appliquer la loi pénitentiaire de 2009.


Dans la cour de la maison d'arrêt Jacques-Cartier de Rennes (Catherine Rechard/Candela Productions)

Dans « Le Déménagement », on voit d'abord les détenus à la maison d'arrêt Jacques-Cartier, en pleine ville de Rennes. L'un d'eux raconte qu'il aime regarder les maisons, et apercevoir cette femme qui fume une cigarette en même temps que lui, à sa fenêtre d'un immeuble voisin. Ils se font coucou de la main.

Puis les prisonniers partent vers le centre de détention de Vézin-le-Coquet, construit au milieu de nulle part. L'ambiance est glaciale, déshumanisée. A l'image, un gardien de prison s'en plaint ; un détenu demande son transfert.


Dans la cour du centre de détention de Vézin-le-Coquet (Catherine Rechard/Candela Productions)

D'autres docus diffusés sur Canal + sans floutage

Même si la réalisatrice conteste avoir eu cet objectif, ce documentaire constitue donc, en filigrane, une puissante remise en cause du plan prison du gouvernement : des maisons d'arrêt classiques, on passe progressivement à des centres plus éloignés des villes, gérés par des entreprises privées et faisant la part belle à l'automatisme et à la vidéosurveillance.

Présenté par Michèle Alliot-Marie quand elle était garde des Sceaux, ce « plan prisons » a depuis été « allégé » par son successeur, Michel Mercier.

Boris Targe rappelle qu'en 2010, le ministère de la Justice a reçu 2 150 demandes de tournage en prison, « acceptées à 75% ». Mais dans la plupart des cas, les détenus sont floutés, même s'ils ont demandé à apparaître.

Le réalisateur Jean-Xavier de Lestrade, oscarisé en 2002 pour un film judiciaire tourné aux Etats-Unis, déclare que deux de ses documentaires filmés en France ont été diffusés par Canal+ alors que les visages des détenus n'étaient pas floutés. La chaîne a eu le courage d'affronter des poursuites judiciaires de la part du ministère. Mais le ministère n'a jamais poursuivi.

Dans la salle, plusieurs personnes ont pris la parole pour livrer un avis autorisé, leur présence suscitant parfois la surprise des autres : des avocats, une contrôleuse dépêchée par le contrôleur général des lieux de privation de liberté, une présidente de la 17e chambre correctionnelle du tribunal de Paris (celle qui juge les délits de presse)...

France 3 : « Nous avons un actionnaire, c'est l'Etat »

Mais l'apparition la plus surprenante fut celle de Jérôme Poidevin, directeur délégué de France Télévisions en charge des antennes régionales. Il a abondé dans le sens du producteur et de la réalisatrice du film.

Puis une question a fusé :

« Mais pourquoi ne passez-vous pas outre la décision de l'administration, comme l'a fait Canal + ? »

Sa réponse a eu le mérite de la clarté :

« Nous avons un actionnaire, et cet actionnaire, c'est l'Etat. »

Source: Rue 89. 
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17 octobre 2011 1 17 /10 /octobre /2011 12:00
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Esther Vivas est membre du Centre d’études sur les mouvements sociaux de l’Universitat Pompeu Fabra de Barcelone. Activiste sociale pour la souveraineté alimentaire et militante de Isquierda Anticapitalista, elle nous alerte sur la prédominance du capital privé qui impose les goûts, marques et produits.
En collaboration avec Xavier Montagut, elle a publié les livres Del Campo al Plato, Où va le commerce équitable ? et Supermercados, no gracias.

Vous êtes co-auteur du livre Del Campo al Plato (Ed. Icaria, 2009). Selon vous, ils nous empoisonnent ?
Le modèle de production d’aliments oppose les intérêts privés et ceux des entreprises aux besoins alimentaires des gens, leur santé et le respect de l’environnement. Nous mangeons ce que les grandes entreprises de ce secteur veulent. Il y a actuellement dans le monde le même nombre de personnes qui ont faim que de personnes ayant des problèmes de surpoids, ce qui touche, dans les deux cas, les secteurs les plus pauvres de la population, tant dans les pays du Nord que dans ceux du Sud. Les problèmes agricoles et alimentaires sont mondiaux et sont le résultat de la transformation des aliments en marchandise.

925 millions de personnes dans le monde ont encore faim aujourd’hui. C’est la preuve de l’échec du capitalisme agro-industriel ?
Oui. L’agriculture industrielle, kilométrique, intensive et dépendante du pétrole a montré qu’elle était incapable de nourrir la population, car elle a un fort impact sur l’environnement en réduisant l’écodiversité, en engendrant un changement climatique et en détruisant des terres fertiles. Pour arrêter la faim dans le monde, il ne s’agit pas de produire plus, comme l’affirment les gouvernements et les institutions internationales. Au contraire, il faut démocratiser les processus de production et faire en sorte que les aliments soient accessibles à l’ensemble de la population.

Les entreprises multinationales, l’ONU et le FMI proposent une nouvelle « révolution verte », des aliments transgéniques et le libre échange. Quelle alternative peut être proposée par les mouvements sociaux ?
Nous devons récupérer le contrôle social de l’agriculture et de l’alimentation. Quelques multinationales, qui monopolisent chaque étape de la chaîne agroalimentaire, ne peuvent pas décider de ce que nous devons manger. La terre, l’eau et les graines doivent appartenir aux paysans, à ceux qui travaillent la terre. Ces biens naturels ne doivent pas être l’objet d’un commerce pour faire de la spéculation. Nous, consommateurs, devons pouvoir décider de ce que nous mangeons, si nous voulons consommer des produits sans OGM. En définitive, nous devons miser sur la souveraineté alimentaire.

Pourriez-vous définir le concept de souveraineté alimentaire ?
C’est avoir la capacité de décider de tout ce qui a trait à la production, la distribution et la consommation des aliments. Miser sur la culture de variétés locales, de saison, saines. Encourager les circuits courts de commercialisation, les marchés locaux. Lutter contre la concurrence déloyale, les mécanismes de dumping, la volonté d’exportation. Arriver à cet objectif implique une stratégie de rupture avec les politiques de l’Organisation mondiale du commerce (OMC).
Mais revendiquer la souveraineté alimentaire ne veut pas dire un retour romantique au passé, au contraire, il s’agit de retrouver la connaissance des pratiques traditionnelles et de les associer aux nouvelles technologies et savoirs. [...]

Via Campesina affirme qu’aujourd’hui manger s’est converti en un « acte politique ». Êtes-vous d’accord ?
Absolument. Ce que nous mangeons est le résultat du mercantilisme du système alimentaire et des intérêts de l’agrobusiness. Le mercantilisme mis en œuvre dans la production agroalimentaire est le même que celui qui touche d’autres contextes de notre vie : privatisation des services publics, précarisation des droits du travail, spéculation sur le logement et le territoire. Il faut opposer à cela une autre logique et s’organiser contre le modèle agroalimentaire actuel dans le cadre d’une lutte plus générale contre le capitalisme mondial.

Nous sommes entre les mains des grandes chaînes de distribution. Qu’est-ce que cela implique et quels effets ce modèle de consommation entraîne-t-il ?
Aujourd’hui, sept entreprises de l’État espagnol contrôlent 75 % de la distribution des aliments. Et cette tendance représente plus que cela. De cette façon, le consommateur a de moins en moins accès à la nourriture et la même chose se passe avec le producteur qui veut atteindre le consommateur. Ce monopole garantit un contrôle total par les supermarchés lorsqu’ils décident de notre alimentation, comment elle est élaborée et du prix de ce que nous mangeons.

Les solutions individualistes servent-elles à rompre avec ces règles de consommation ?
L’action individuelle a une valeur démonstrative et apporte une cohérence, mais elle n’entraîne pas de changements structuraux. Nous avons besoin d’une action politique collective, de nous organiser dans le contexte de la consommation, par exemple, à partir de groupes et de coopératives de produits biologiques ; créer des alternatives et promouvoir de grandes alliances qui participent à des campagnes contre la crise, pour la défense du territoire, des forums sociaux, etc. [...]

Kyoto, Copenhague, Cancùn. Quel bilan général peut-on tirer des différents sommets sur les changements climatiques ?
Le bilan est très négatif. Lors de tous ces sommets, les intérêts privés et le court terme ont eu plus de poids qu’une réelle volonté politique ayant pour but de mettre fin aux changements climatiques. Aucun accord n’a été trouvé pour permettre une réduction effective des gaz à effet de serre. Au contraire, les critères mercantiles ont été une fois de plus la monnaie d’échange et le mécanisme de commerce d’émissions en est, à cet égard, l’expression la plus significative.

À Cancùn, l’idée d’une « adaptation » au changement climatique a été beaucoup reprise. Les intérêts des compagnies multinationales et d’un prétendu « capitalisme vert » se cacheraient-ils derrière cela ?
Tout à fait. Au lieu de solutions réelles, on choisit de fausses solutions telles que l’énergie nucléaire, la captation de carbone dans l’atmosphère pour le stocker ou les biocarburants. Par ces mesures, on ne fait qu’intensifier plus encore la crise sociale et écologique et donc créer d’énormes bénéfices pour un petit nombre d’entreprises. [...]

La solution est-elle de changer le climat ou le système capitaliste ?
Un changement radical de modèle est nécessaire. Le capitalisme ne peut apporter de solution à une crise écologique que le propre système a créée. La crise actuelle provoque un besoin urgent de changer le monde à sa base et de le faire dans une perspective anticapitaliste et écologiste radicale. Anticapitalisme et justice climatique sont deux combats qui doivent être étroitement liés.

Entretien publié par le site Rebelión et diffusé par EcoDebate, traduction Karine Lehmann & Jean Saint-Dizier pour Autres Brésils. Propos recueillis par Enric Llopis.

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16 octobre 2011 7 16 /10 /octobre /2011 18:32

Nous en parlions ici. Yvan Benedetti et Alexandre Gabriac, deux "purgés" du FN, membres de l'Oeuvre Française - groupuscule antisémite et pétainiste-, lanceront samedi 15 octobre une nouvelle structure militante : les Jeunesses nationalistes, à l'occasion du "Forum de la nation" organisé par M. Benedetti à Lyon.

C'est Alexandre Gabriac, rendu "célèbre" au printemps dernier avec la fameuse affaire de la photo où il faisait un salut nazi devant un drapeau à croix gammée, qui devrait diriger ces "Jeunesses". A la suite de la diffusion de cette photo, Marine Le Pen l'avait immédiatement exclu du FN, malgré les réserves de Jean-Marie Le Pen.

Et si M. Gabriac se tenait à un certain "devoir de réserve" quand il était encore au FN, le jeune conseiller régional Rhône-Alpes ne prend plus les mêmes précautions...

 

L'emblème des Jeunesses nationalistes

L'emblème des Jeunesses nationalistes

Ainsi, l’emblème des Jeunesses nationalistes est on ne peut plus clair : un aigle au style évoquant furieusement les aigles des mouvements fascistes et nazis européens des années 30-40, tenant un faisceau entre ses serres et entouré d'une couronne de laurier rappelant la marque Fred Perry chère aux skinheads et aux hooligans. Le tout dans un code couleur jaune doré sur fond noir.

"Les aigles ne sont pas réservés au IIIe Reich", s'amuse Yvan Benedetti. "On veut créer un bloc solide nationaliste pour créer des officiers politiques qui pourront agir dans le champ politique, associatif ou éditorial, continue-t-il. Pour nous, les élections ne sont pas une fin en soi. On veut mettre l'accent sur la formation des jeunes."

Les Jeunesses nationalistes seront un groupe d'extrême droite radicale de plus dans l'écosystème très particulier de la région lyonnaise, où les hooligans, les skinheads, l'Oeuvre Française et les identitaires sont très présents et s'opposent très violemment aux organisations antifascistes.

Gabriac toujours dans le groupe FN au Conseil régional

A noter que M. Gabriac, ainsi qu'Olivier Wyssa, autre "purgé" proche de l'Oeuvre Française continuent de siéger au groupe FN au conseil régional Rhône-Alpes. Une situation qui gêne les « marinistes » comme Dominique Martin qui ne se risque pas à s'exprimer sur le sujet et renvoie vers Bruno Gollnisch, le président de groupe. Ce dernier reconnaît que "la situation doit être clarifiée. Pour le moment ils siègent toujours dans le groupe. Ils devraient être apparentés". Ce qui signifie que MM. Gabriac et Wyssa prennent encore la parole au nom du groupe FN...

Si M. Gabriac, particulièrement "actif" en région lyonnaise dans tous les sens du terme s'occupe du volet "jeunes", M. Benedetti, lui, prend en charge les "adultes". Avec l'ambition de dépasser la sphère de l'Oeuvre française pour parler aux autres groupes politiques de la scène d'extrême droite, hors Front national, et tenter de fédérer les plus radicaux.Le Forum de la Nation qu'il organise samedi doit aussi servir à cela.

Couac ukrainien

Seront ainsi présents ce samedi 15 octobre, un représentant de la Nouvelle droite populaire de Robert Spieler et Roland Hélie, Christian Pérez du Parti populiste, André Gandillon du groupe Militant, ou encore de Pierre Sidos, président de l'Oeuvre Française. Yvan Benedetti assure par ailleurs qu'aucun membre du FN n'a été invité pour ce Forum de la Nation. Même pas Bruno Gollnisch qui avait pourtant été invité par deux fois en 2007 et en 2010. Un Bruno Gollnisch dont Benedetti fut longtemps un proche.

Côté étranger, Alberto Torresano, chef de la Falange espagnole, et habitué de ce genre de réunion sera présent. A la différence d'Oleg Tiahnybok, président du parti nationaliste ukrainien Svoboda. La raison ? Svoboda fait partie de l'Alliance européenne des mouvements nationaux et a, à ce titre, un "protocole" avec le FN. Apprenant sa venue au Forum de la Nation à Lyon, Marine Le Pen a envoyé à M. Tiahnybok un mail mettant un terme "aux relations bilatérales" entre les deux partis. Ce, après lui avoir rappelé les engagements passés et répétés que le parti Svoboda avait pris auprès d'elle. Il avait en effet promis de ne pas "entretenir des liens avec de tels groupuscules". Du coup, les Ukrainiens ont préféré annuler leur venue.

"Travail, famille, patrie: des valeurs d'avenir"

En tout cas, ce Forum de la Nation, est l'occasion pour Yvan Benedetti de marquer encore sa différence d'avec le Front national de Marine Le Pen qui a, selon lui, "une ligne gauchisante". Celui qui se définit comme un "révolutionnaire" a décidé de rendre hommage au Maréchal Pétain, lors du banquet de samedi soir.

"On me dit que c'est de la nostalgie. Mais le Système revendique une période sombre où l'on coupait les têtes [la Révolution française], où des gens se réunissaient en secret avec des tabliers de cochon [les loges maçonniques]... C'est pas nostalgique, ça ? » lance M. Benedetti. Lequel défend la "Révolution nationale" de Pétain : "Il y a eu une renaissance nationale avec la Révolution nationale. C'est le seul moment où quelqu'un a remis en cause les fondements de la Révolution bourgeoise de 1789. Travail, famille, patrie, ce n'est pas de la nostalgie. Ce sont des valeurs d'avenir. Plus que l'Egalité et la Fraternité, qui ne sont que des mots creux et utopiques ".

NB : Si la présence de Pierre Sidos au Forum de la Nation est naturelle, M. Benedetti ayant été son bras droit pendant des années, il faut noter que M. Sidos a suivi avec attention les travaux du Club de l'Horloge les 8 et 9 octobre. Venu « pour la première fois » chez les « Horlogers », M. Sidos ne cachait pas son hostilité pour l'avocat marseillais. Il a suivi les deux jours de débat « parce qu'[il avait] entendu dire que Collard venait ». Pour lui, « ce n'est pas au nouveau converti de porter la bannière ». Sur la venue de Gilbert Collard au Club de l'Horloge, voir ici.

Source: VISA.

 

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16 octobre 2011 7 16 /10 /octobre /2011 17:20

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Des peintures des expulsés dans le camp de Montreuil (David Perrotin)

(De Montreuil) Le terrain est vague, silencieux et bien isolé. Des vélos et quelques jouets d'enfants traînent au sol. Une odeur de cuisine caresse le nez et quelques rires sont perceptibles. Depuis trois semaines, près de 300 personnes, des sans-papiers pour la plupart, dorment dans ce camp de fortune aménagé sur le stade André-Blain à Montreuil (Seine-saint-Denis).

Des travailleurs (ouvriers, plombiers, femmes de chambre…), des femmes et des enfants (dont un bébé de 9 mois), dorment dehors tous les soirs et redoutent l'hiver qui arrive.

Des tentes, artisanales ou de camping, sont disséminées un peu partout. L'aménagement semble rodé : un coin cuisine, un coin salon et un coin prière, garantissent le bon vivre ensemble.

Et pour l'hygiène, l'ancien vestiaire du stade fait office de sanitaires. Le camp est très structuré et a pour principe de se séparer des habitants qui ne respecteraient pas les règles.

 


Des tentes dans le camp de Montreuil (David Perrotin)

Le 30 juillet, 59 cars de CRS évacuent les lieux

Ces sans-logis de onze nationalités d'Afrique vivent dehors depuis presque trois mois. Depuis 2007, ils squattaient une imprimerie désaffectée rue de Sorins à Montreuil, jusqu'au jour ou son propriétaire à voulu récupérer l'usine. Le porte-parole des anciens squatteurs, Issa Cissé, explique :

« On avait passé en quelque sorte un marché avec le propriétaire de l'imprimerie désaffectée. Nous habitions dans sa propriété sans payer de loyer, et en échange nous protégions le matériel qui était toujours dans l'usine. C'était notre mission, pour éviter que des squatteurs malveillants dégradent l'endroit. »

Pendant quatre ans, le propriétaire ne se manifeste pas. La mairie, dirigée par Dominique Voynet, soutient même le projet d'installer des points d'eau. Les habitants du squat ont déboursé environ 13 000 euros pour mettre aux normes l'usine. Jusqu'à ce que le 30 juillet, 59 cars de CRS évacuent les lieux et en profitent pour arrêter des sans-papiers, comme le raconte Issa Cissé :

« Les policiers ont fait un tri et ont embarqué 80 personnes. Nous avons, à l'aide d'associations, fait des recours, mis en avant des vices de forme, et tous ont été relâchés. »

Le square, puis le terrain de foot
Des artistes au service de leur cause

La particularité de ce mouvement, c'est peut-être la stratégie engagée par ces expulsés pour obtenir un logement. Ils ont en effet décidé de se défendre grâce à l'art, à travers la peinture, la musique et même le théâtre.

Des habitants de la ville et quelques artistes sont venus peindre ou dessiner les 80 expulsés. Ils ont eu envie de poser un visage sur ceux que l'on nomme les immigrés, les sans-papiers, les étrangers. Pour les identifier, les humaniser et sensibiliser les gens à leur cause.

C'est Mathilde Meignan, scénographe et voisine du squat, qui a eu l'idée de ces portraits : « Je me suis dit que la façon la plus simple de faire apparaître des gens, c'est de les dessiner. Certaines personnes n'osent pas rencontrer ces sans-abris uniquement par pudeur, d'autres préfèrent les ignorer. Parfois c'est plus simple de regarder un portrait, plutôt qu'un vrai visage. »

Les expulsés ont donc trouvé refuge dans un square du quartier. Mais des tensions avec le voisinage les contraignent à déménager sur ce stade de foot mis à disposition par la mairie.

Depuis, la situation reste figée, les autorités publiques se renvoyant la balle à tour de rôle. Dominique Voynet a mis en cause la responsabilité de l'Etat dans un communiqué :

« Ce n'est pas aux communes qu'incombe la responsabilité de l'hébergement d'urgence et de l'aide aux personnes sans abri. J'appelle l'Etat à prendre ses responsabilités et à proposer des solutions de relogement dignes aux occupants du squat. »

Interrogée sur le sujet, la préfecture de Bobigny, en charge du dossier, renvoie la balle à la municipalité :

« Pour savoir si nous devons reloger ces personnes, encore faudrait-il qu'ils [la mairie de Montreuil] nous fournissent des dossiers. Hors, jusqu'à ce jour, nous n'avons reçu aucune demande administrative de logement. »

Est-il possible que ces 300 expulsés passent l'hiver dehors ? Le chargé de communication de la préfecture reste évasif sur la question :

« Je ne peux rien prévoir du tout, tant que nous n'avons pas de dossier. Même pour les suites judiciaires, cela dépend de la mairie puisque les expulsés ne sont pas sur un terrain du domaine public, mais sur celui de la municipalité. Il faut donc demander à la mairie ce qu'ils comptent faire. »

Dominique Voynet mise en cause

Le portrait d'un des expulsés, à Montreuil (David Perrotin)

Contactée à plusieurs reprises, la mairie n'a pas donné suite à nos appels. Le porte-parole du camp, très agacé, tient à rectifier certaines choses :

« La mairie nous a aidés au début, mais ne semble plus faire grand-chose aujourd'hui, contrairement à ce qui est écrit dans la presse. On dit qu'elle aide les gens à se soigner mais c'est faux, puisque 60 personnes ici sont en attente de l'AME [l'aide médicale de l'Etat, ndlr], et ils ne peuvent pas l'obtenir puisqu'ils n'ont pas d'adresse. »

Le slogan du camp mêle amertume et espoir et se résume ainsi : « Hier colonisés, aujourd'hui exploités, demain régularisés".

Source: Rue 89.

 

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Non au Front National !

Camarades ,

Ne nous livrons pas aux chants des sirènes fascistes, qui sous couvert d'un discours anti-systémique bien rôdé, ne visent qu'à instaurer un régime aux relents des années 30. Ne soyons pas naifs face à ce nouvel ordre moral que veulent imposer par le mensonge et la peur les tenants de la haine et du "sang pur". Sous couvert d'une fausse expression démocratique et médiatique, le FN ne s'est jamais détaché de ce qui a construit son origine : une droite populaire qui rejette le prolétaire, une droite chrétienne qui rejette le non-croyant ou l'autre croyant, une droite corporatiste qui rejette l'union des travailleurs. Le FN a ses petits groupuscules néo-nazi dont il se défend d'être en lien publiquement mais avec qui il travaille bien tranquillement  : GUD, bloc identitaire et autres "natios".

    Et lorsque l'on se penche sur son programme politique le vernis craque : Contre la retraite par répartition et tout ce qu' a fondé le CNR de 1945 (où était-il lors des manifs de 2010 ?)  , contre les droits des salariés ( poujadiste un jour, poujadiste toujours !) etc... 

De nombreux documents démontrent l'imposture du FN. L'UPAC vous en propose deux :

- Celui du collectif communiste Prométhée dans son numéro 85, (site net : http://promcomm.wordpress.com), 5 pages.

-Celui du collectif VISA (Vigilance et Initiatives Syndicales Antifascistes), qui s'intitule "FN, le pire ennemi des salarié(e)s" et dont le lien est sur le blog, 29 pages. 

 

Ne lâchons rien ! 

Face au bras tendu du facho, levons le poing ferme du prolo !! 

 

Vêtements et accessoires skinheads et Antifas.

            Site "La Pétroleuse" : Clic<  link

 

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            Site "Antifa Wear" : Clic<  link

 

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Modèle 25 mm

 

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Modèle 32 mm.

 

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Fabrication "FFC Production".